first date ?

ft. JUNG Yoonhee

First date ?

J'avais attendu ce jour dès lors que la date avait été fixée.

Quand j'ai rencontré Yoonhee, je me suis demandé comment un être humain pouvait dégager autant de charme. Je crois que j'ai passé l'heure de cours à l'observer plutôt qu'à écouter ce qu'il nous racontait. Je n'étais pas le seul à être fasciné par sa personne, puisque certaines filles rigolaient sur le fait de vouloir des cours particuliers avec lui. Un homme de vingt-six ans, professeur face à des étudiants d'une vingtaine d'année... Il n'est passé inaperçu aux yeux de personne. Les jours passaient, et ça a commencé avec quelques regards en coin, puis c'est devenu des regards bien plus profonds – je l'ai surpris à me regarder d'une telle façon que j'avais l'impression qu'il lisait en moi. Ce jeu a fini par nous amener à nous parler une fois, deux fois, puis à chaque fois que j'avais cours avec lui. J'ai été surpris de voir qu'il m'avait tout de suite cerné. Si je n'en avais jamais parlé à mes amis, je n'ai pas eu besoin de deux ans pour qu'il comprenne toute la vie que je cachais derrière moi.

J'ai arrêté mes études il y a deux mois maintenant, et nous avons gardé contact par le biais de courriers électroniques. Plus le temps passait, plus j'avais cette impression de devenir quelqu'un d'autre : il a fallu que je me rende à l'évidence que j'étais tombé amoureux de mon ancien professeur. Il y a quelque chose de différent lorsque je parle avec lui que lorsque je parle à mes amis. Je n'ai jamais su définir notre relation, et je n'ai jamais su comment il me voyait – tout ce que je savais, c'était que nous étions plus que de simples amis. Lorsqu'il m'a proposé de se retrouver chez lui il y a quelques jours, je me suis tout de suite mis à l'idée que c'était une sorte de rencard et c'est pour cela que j'avais mis autant de temps à me préparer. J'avais repassé ma chemise blanche que j'avais rentré dans un jean noir, et j'avais enfilé mes chaussures cirées de la même couleur. En plein mois de février, les températures étaient encore basses et même si j'avais vécu en Russie jusqu'à mes dix-huit ans, je ne m'étais jamais habitué au froid. Je m'étais donc vêti de mon long manteau et de mon écharpe rouge pour rejoindre le métro à quelques minutes à pieds où je vivais. Ton appartement se trouvait trois stations plus loin. Mais je crois que la chance n'est pas avec moi car à peine je sors la tête de la station qu'une averse se met à s'abattre sur la ville. Et évidemment, je n'avais pas pris de parapluie avec moi. « Mince... Pourquoi maintenant... » J'ai à peine le temps de me mettre à l'abri que mes cheveux sont déjà trempés tout comme les lunettes que je porte sur mon nez. J'essuie ces dernières, puis relève mes yeux pour observer la ville. « Même sous la pluie, Gangnam est toujours... Gangnam. » Pour ne pas arriver en retard, je défais l'écharpe autour de mon cou et m'abrite la tête à l'aide de celle-ci. Ce n'étais pas le meilleur parapluie, mais ça allait suffir pour le trajet. Heureusement, tu n'habitais pas loin de la gare – à l'aide d'un papier qui lui aussi commençait à mouiller, je suis les indications que tu m'as données. Le quartier était vraiment sublime et... Ton appartement aussi. Ça ne m'étonnait pas. Je grimpe les marches pour aller jusqu'à la porte d'entrée sur laquelle je frappe, et un sourire éclatant naît sur mes lèvres lorsque tu viens m'ouvrir. « Bonjour... Yoonhee. » J'avais encore beaucoup de mal à te tutoyer. J'essuie mes chaussures sur le tapis prévu à cet effet lorsque tu te décales pour me laisser entrer, et je te remercie. « La pluie m'a surpris, alors je suis un peu moui... Mince ! » Évidemment, l'eau n'était pas tombée que sur le tapis. Je porte une main à mes lèvres en voyant les quelques gouttes sur le sol – pour une première rencontre hors-cours, tu faisais fort, Luka. « Excusez-m- Je veux dire, excuse-moi ! Est-ce que tu peux me donner quelque chose pour essuyer, s'il te plaît ? » J'étais rarement gêné, mais en face de toi, tout paraissait surdimensionné.

First date ?

ft. Yakov Luka

J’étais clairement en manque de lui. Cela faisait une petite éternité que je n’avais pas eu l’occasion de voir son visage, ou ne serait-ce qu’écouter le son de sa voix. Même son parfum me manquait. Il m’était même arrivé de rêver de lui. Des rêves plutôt plaisants mais assez perturbants. C’était loin d’être des songes innocents. J’avais eu le droit d’entendre ses gémissements et ses soupirs.
C’est là que m’est venu l’idée de l’inviter boire un café en ma compagnie.

Luka était initialement un de mes malheureux élèves. C'était ma première année en tant que professeur. Je n'étais qu'un simple chargé de td de Théorie des jeux. Ce genre de matière qui n'intéresse que peu de personnes, rien d'étonnant d'ailleurs. Le mot "jeux" peut être assez trompeur. Beaucoup pensaient s'amuser et faire les malins, mais manque de chance... Ils étaient tombés sur moi. Mon jeune âge était également trompeur. Mon manque d'expérience ne faisait pas de moi un petit agneau sans défense. Yakov était assez calme mais étrange. Il n'était pas un fouteur de trouble, mais il avait su attirer mon attention. Il venait d’un autre monde, il n’était pas à sa place. Il était différent des autres.

Avant son arrivée, j’avais su rester calme mais j’étais clairement impatient. Je n’avais pas su faire correctement les choses. J’avais tenté de préparer de quoi manger ou grignoter, mais étrangement mon cerveau paraissait parfois déconnecté. Je m’étais trop de sucre, ou trop de sel. C’était assez inhabituel, c’est pourquoi j’avais fini par ne rien faire. Je l’avais attendu sur mon canapé, zappant les chaines de TV a la recherche de quelques choses d’un minimum intéressant. Les heures et minutes m’avaient paru assez longues jusqu’à que la sonnette se décide enfin à s’exprimer. Il était temps.

Je lui avais ouvert la porte, et il était trempé. J’étais heureux de le voir, mais mon attention était plus portée sur ces gouttelettes qui tombaient dans mon salon que sur sa personne. Il s’excusait, et évidemment je ne pouvais pas craquer devant lui. Je levais le regard sur son visage, affichant un petit sourire. « Ne t’inquiète pas. Ce n’est pas grave. Je t’apporte une serviette. Veux-tu des vêtements de rechange ?»

Je n’avais pas attendu sa réponse avant de le prendre par le bras pour le tirer dans ma chambre. J’avais pris quelques serviettes, et un de mes pyjamas. Le plus confortable que j’avais pu trouver. Ça me faisait un peu mal au cœur de prêter mes affaires, mais ce n’était pas le plus important. Le petit Yakov risquait de tomber malade. J’étais assez grand pour faire des sacrifices, et puis c’était peut-être l’occasion de me rapprocher un peu plus de sa personne? Je soupirais légèrement en songeant à toute l’eau que je devais nettoyer.

« Si tu as besoin d’autre chose, n’hésites pas à m’appeler. Je vais dans la cuisine préparer de quoi boire. »
Je priais pour qu’il ne fouille pas dans mes placards. J’avais horreur de ça, et je savais que je n’allais pas savoir me contrôler dans ce genre de contexte. Je lui avais adressé un dernier sourire avant de le laisser seul dans la pièce.

En cuisine, j’avais préparé du café mais également du thé et un chocolat chaud. Je ne savais pas ce qu’il préférait et j’avais totalement oublié de lui demander...

ⓒMR.ROSE